Ont participé à cette table-ronde :
Marie-Noëlle LIENEMANN, Présidente de la FNSCHLM, députée européenne
Jean-Paul BRIGAND, consultant
Laurent GHEKIERE, directeur de la délégation de l'Union sociale pour l'habitat auprès des institutions européennes
La table ronde a été animée par Jean-Pierre TROCHE.
Jean-Pierre TROCHE
Notre période présente à la fois une grande vertu et un poids dont l'évidence peut réunir tout le monde. Partisans d'un oui massif ou critique, d'un non hésitant ou très européen, nous sommes tous d'accord sur le fait que nous avons insuffisamment débattu sur l'Europe. Il existe déjà une réalité européenne que nous ne mesurons pas dans la réalité de nos pays. Dans cette perspective, il faut parler des enjeux européens tels qu'ils se présentent aujourd'hui.
Nous avons tous lutté pour que le droit au logement soit constitué dans les faits et dans le droit. En tant qu'acteurs du logement social, nous avons une posture inverse : notre réalité nationale, le jeu des acteurs et les opérateurs peuvent paraître spécifiques. La subsidiarité est réclamée afin que ces spécificités soient conservées. Cette ambivalence est-elle vraiment justifiée ? Ne sommes-nous pas déjà dans l'Europe, en termes de logement et d'habitat ? Nous nous situons dans le champ de l'économie et des discussions sur les services d'intérêt général.
Je souhaite m'adresser à Laurent Ghekière, le « Monsieur Europe des HLM » : la situation française est-elle fondamentalement différente ? Les subventions, le financement, les opérateurs économiques ne sont-ils pas déjà inscrits dans les débats et le fonctionnement européen ?
Laurent GHEKIERE
Notre situation n'est pas fondamentalement différente de celles des autres pays qui ont mis en place des systèmes de logement social ou d'opérateurs spécifiques qui répondent à des missions particulières. Si les cultures et les visions diffèrent, nous retrouvons les mêmes principes. Nous avons conservé un système très centralisé et une organisation très éclatée en matière territoriale. Le 1 % logement est un système très centralisé de financement. Nous soulevons néanmoins les mêmes questions que les autres pays.
Sur ce point, nous ne relevons pas de l'Europe car il n'existe pas de compétence en matière de politique de logement.
Au contraire, en tant qu'opérateur et entreprise mandatée, les organismes HLM sont concernés par l'Europe. Le Conseil d'Etat a déclaré que les organismes HLM relevaient des dispositions des traités par rapport à l'activité économique. Aujourd'hui, en l'état du traité, la Cour considère que les deux seules activités non économiques sont les régimes de protection sociale obligatoire et de pension obligatoire. En tant qu'opérateur économique, vous être donc soumis à toutes les dispositions du traité. Face à ce constat, vous êtes également concernés en tant que pouvoirs adjudicateurs. Contrôlées par l'Etat, les commandes que vous passez sont considérées comme des commandes publiques. La contrainte est donc double. La Cour a en effet considéré que l'Etat conservait un contrôle sur la gestion des organismes. Ces deux handicaps doivent être pris en compte puisque le droit communautaire prime sur le droit national.
Il existe toutefois un avantage concurrentiel : l'Etat français vous considère comme un service d'intérêt général. Economiques, les organismes HLM ont une mission d'intérêt général confiée par la loi. Le traité actuel est ainsi complexe. Il existe un principe d'équilibre entre les dispositions du traité et le bon accomplissement des missions d'intérêt public. En aucun cas les dispositions du traité ne peuvent nuire au bon accomplissement des missions qui vous sont confiées. Si vous n'êtes plus en mesure de remplir vote mission, vous pouvez saisir la Cour en invoquant l'article 86-2 : il n'y a pas de primauté de la mission sur le droit communautaire. Cet article prévoit un équilibre entre, d'une part, les règles du marché intérieur et de la concurrence, qui priment, et d'autre part l'obligation que ces règles ne fassent pas entrave à la mission.
La Commission qui représente à la fois l'exécutif et la gardienne du traité, n'a pas tenu compte dans ses propositions récentes de cet équilibre. Elle a proposé des dispositions qui privilégient le marché intérieur sans tenir compte de la nécessité de ne pas impacter les missions. La charge de la preuve appartient à l'opérateur ou à l'autorité publique. Nous avons donc un véritable problème d'interprétation de cet équilibre voulu par le législateur. De plus, parce que nous nous situons dans une logique de marché intérieur qui repose sur des libertés fondamentales, nous avons occulté le fait que la liberté d'établissement pourrait impacter la capacité des autorités publiques d'imposer des missions d'intérêt général.
Par ailleurs, les aides d'Etat aux entreprises sont interdites pour les Etats-membres. Néanmoins, pour les missions d'intérêt général, une disposition du traité permet d'accorder des aides publiques à condition qu'elles ne fassent pas que compenser les coûts et surcoûts liés à la mission d'intérêt général. Un Etat-membre peut financer les surcoûts, mais au-delà il s'agit d'un avantage économique. Cette analyse oblige à clarifier les textes et à identifier les missions et les fonctions des services publics. Ce calcul interdit toute péréquation et n'est pas du tout adapté à un système où ont été créés les opérateurs spécifiques. A travers la décision du Conseil d'Etat, développée au niveau communautaire, il est difficile de faire comprendre que le logement n'est pas aussi facile à gérer qu'une ligne de train : évaluer a priori le coût du logement de populations spécifiques est complexe Nous sommes dans l'impossibilité de faire la péréquation entre un patrimoine amorti et un patrimoine déficitaire.
Nous avons obtenu que le logement social soit exempté de notification. Le Parlement a mis la barre à droite avec l'élargissement : il a émis une résolution largement plus contraignante que la décision de la DG concurrence. Comptant 800 personnes pour gérer 2 000 notifications par an dans l'industrie, la DG concurrence ne peut pas prendre en compte le secteur logement. La méthodologie que l'Europe veut imposer aux Etats-membres pour apprécier la juste compensation est ridicule. Ces considérations très économiques montrent leurs limites dès lors qu'elles s‘appliquent au logement. Malgré la volonté de régler le problème de l'illégalité des aides d'Etat, celui-ci demeure. Nous sommes obligés de composer avec ces contraintes juridiques alors que les Etats-membres n'ont pas de compétence puisqu'il n'existe pas de Conseil logement. Nous n'avons pas d'interlocuteur sur ce thème au Parlement. Grâce à votre présidente, un intergroupe sur le logement urbain vient d'être constitué. Le Parlement ne fait plus contrepoids à la politique de la Commission.
Il nous revient d'intervenir auprès du Parlement à propos de la directive services en disant qu'elle nuit à l'article 86-2. La notion même d'opérateur spécifique est attaquée. Les HLM sont soumis à un régime d'autorisation. Sans agrément, il n'est pas possible d'avoir accès aux aides de l'Etat.
Marie-Noëlle LIENEMANN
Concernant les aides publiques, l'Europe fonctionne à partir de textes juridiques. Les mots sont importants. Les Etats-membres doivent avoir les moyens de garantir que les missions de service public sont remplies. Le principe de fond est le marché, qu'il s'agit de ne pas gêner. Or nous voudrions plutôt favoriser le logement social. Soit il est reconnu qu'il s'agit d'un droit pour lequel des outils spécifiques sont prévus, soit nous équilibrons le marché et nous devons faire la preuve d'une part que les missions sont d'intérêt public, alors que cette expression n'est pas définie, d'autre part que nos aides sont adéquates par rapport au coût. Il existe des champs aux marges du marché pour lesquels nous créons des règles spécifiques. Cela concerne notamment la péréquation tarifaire ou régionale et l'illégitimité des profits excessifs. A un certain niveau, le profit doit être réinvesti pour prévoir l'avenir. Les bénéfices des structures sont réinvestis. Seul le PEAI, le coût « très social » est pris en compte : le reste est considéré comme suspect.
A terme, les aides à la personne demeurent mais les aides à la pierre sont menacées alors que ce sont celles que nous voulons fortifier. Il existe peu de recours, mais tout dépend de la période. Tant que l'immobilier va bien, nous ne risquons rien. Mais si nous entrons en crise comme en 1992, quand sur les 280 000 logements construits, 100 000 étaient des logements sociaux, le social peut devenir un enjeu si le marché est trop fermé pour les promoteurs privés. La tentation des promoteurs de nous attaquer serait forte.
Nous avons besoin de l'accord du Parlement et, à terme, d'une législation protectrice, car le tribunal peut réduire considérablement nos capacités d'intervention. Le Parlement subit la pression des nouveaux Etats-membres. Traumatisés par l'expérience communiste, ils arborent un ultra-libéralisme terrifiant, proche de la foi. Tout ce qui vient perturber le marché est suspect puisque, par nature selon eux, le marché est toujours meilleur.
Les Etats traditionnellement keynésiens comme l'Allemagne ont tendance à liquider leur patrimoine. Le logement n'est pas un sujet prioritaire pour eux. Il faut absolument mobiliser le gouvernement français et les différents partis pour garantir un équilibre entre le marché et les interventions publiques. L'UMP a voté le rapport sur les aides publiques sans l'amendement dans lequel nous demandons d'être exemptés de la notification. L'UMP votera avec nous, mais ce parti souffre d'une incapacité à mobiliser sur ce thème.
Si nous ne mobilisons pas nos élus, les débats contre l'ultra-concurrence ne soulèveront pas le cas du logement social. Il faut créer un mouvement de défense des pouvoirs publics français, des politiques françaises et de l'opinion de défense d'une certaine spécificité des outils de type HLM.
De la salle
Placées dans un projet ANRU pour sauver le quartier des Pyramides, six sociétés HLM vont investir 600 000 euros chacune, pour acheter le patrimoine. Elles se demandent comment le gérer. Or l'administration demande un appel d'offres car les organismes HLM doivent se placer dans la concurrence. Nous avons proposé de faire un appel d'offres dans le monde HLM. Or il semble que nous devions ouvrir l'appel d'offres au secteur privé.
Laurent GHEKIERE
Nous tombons dans le second handicap que j'ai évoqué : par son pouvoir adjudicateur, l'acte de mandater un opérateur vous fait entrer dans le champ de la commande publique, ce qui nécessite d'organiser un appel d'offres. Le caractère absurde de la situation tient à l'obligation automatique d'appliquer la mise en concurrence même si la finalité est de rester dans le monde HLM. A partir du moment où le niveau de contrôle de l'Etat vous fait qualifier de pouvoir adjudicateur, vous êtes une excroissance de l'Etat. Autant sur les aides de l'Etat, nous gardons une marge d'appréciation pour conserver l'équilibre, autant pour les marchés publics vous êtes ou vous n'êtes pas concernés.
Désormais, même le financement doit être mis en concurrence. Il s'agit en soi d'une absurdité.
Jean-Paul BRIGAND
Le marché peut être rédigé de telle sorte que soit exigées des candidats les compétences qui n'appartiennent qu'au monde HLM, comme un savoir-faire en matière de prévention de risques sociaux. Il faut savoir rédiger un appel d'offres. La mise en concurrence est exigée pour avoir une garantie de transparence et limiter les abus. Les organismes peuvent ainsi exprimer leur demande. Cette exigence n'est pas totalement négative puisqu'elle vise à contrôler les dépenses de l'argent public. Il ne faut pas faire de l'Europe ce qu'elle n'est pas : la directive sur les marchés publics a été longtemps débattue.
Laurent GHEKIERE
Il existe en France une loi qui réserve la gestion des HLM aux SEM et aux organismes HLM. Nous sommes confrontés à une contradiction : d'un côté, l'appel d'offres est obligatoire ; de l'autre, il est réservé à certains opérateurs. La loi française est-elle contraire à la liberté d'établissement et des services ?
Marie-Noëlle LIENEMANN
Je soulignerai la tendance du Ministère à accentuer la vision ultra-libérale de la concurrence. Il manque au droit français des critères qualitatifs qui ont été supprimés pour cause de corruption. Ils sont volontiers acceptés dans d'autres pays.
Laurent GHEKIERE
En Allemagne, le système d'opérateurs banalisés permet d'insérer les exigences dans les contrats.
Jean-Pierre TROCHE
Il faut mobiliser les collectivités locales qui rencontrent des difficultés par rapport aux outils longuement construits dans le cadre de l'aménagement. Obligées de les ouvrir à la concurrence, elles prennent conscience du problème. Il s'agit d'une fenêtre de tir à utiliser. De plus, la réforme actuelle du Code des marchés publics offre de nombreuses possibilités de faire entrer des clauses qualitatives. Nous constatons la crainte d'une certaine suspicion dans l'introduction de ces clauses.
De la salle
Nos partenaires comme le Danemark ou la Suède mènent des politiques de logement social. Je m'étonne que vous ne développiez pas cet aspect. J'ai l'impression que nous sommes revenus à des idées libérales du XIXème siècle. Comment expliquez-vous que ces pays ne défendent pas, au côté de la France, leurs avancées sociales ?
De la salle
Vous semblez oublier le débat qui a lieu au moment du Traité de Maastricht. Nous avons 13 à 14 ans de retard : les dispositions critiquées étaient déjà dénoncées à l'époque.
Laurent GHEKIERE
Les pays nordiques ont une conception du logement social encore plus généraliste que la nôtre. Ils entrent en conflit avec des promoteurs privés s'agissant de la répartition des rôles. La Fédération européenne de la propriété immobilière a déposé un recours contre le système suédois du logement, qui est géré par les communes. Le contentieux est clair : la Cour devra trancher entre le caractère d'intérêt général du fait d'avoir un marché régulé du logement et le principe de liberté d'établissement et de concurrence. Les pays nordiques sont encore plus concernés que nous, qui possédons des obligations de service public. Le service public des pays nordiques a été libéralisé : le modèle idéal est terminé.
Le problème de l'absence de prise de conscience politique de l'impact du marché intérieur sur le logement est lié au fait que le logement n'est pas une compétence européenne. Cette politique de l'autruche entraîne l'administration à ne pas nous défendre à Bruxelles, dans l'attente de l'arrêt de la Cour qui interviendra dans quatre ou cinq ans. L'administration française est responsable d'avoir engagé la France dans un traité instituant un marché intérieur où règne la libre concurrence qui empiète sur les secteurs d'intérêt général. L'arrêt Almart dit clairement que les aides accordées aux organismes HLM sans mise en concurrence sont illégales. La mise en concurrence vise d'abord les organismes HLM entre eux. Nous avons obtenu l'exemption de notification et la France s'y oppose, contrairement à l'avis du Conseil d'Etat. Nous déplorons l'incapacité des politiques présents à Bruxelles de défendre le logement social. Le lobby professionnel fait le travail à leur place en défendant la capacité de la France à faire du logement social.
Marie-Noëlle LIENEMANN
La Suède se défend par le principe de subsidiarité parce qu'il s'agit d'un petit pays, ce qui est courant également pour la Finlande, qui négocie des niches facilement acceptées. La France ne peut pas avoir la même attitude.
Jean-Pierre TROCHE
Passons au sujet de la directive services. Le vocabulaire européen ne parle pas de services publics, mais de services d'intérêt général ou de services d'intérêt économique général. Les premiers sont non marchands, tandis que les seconds relèvent de chaque pays tout en étant soumis aux lois du marché et de la concurrence. Dans ce contexte qui préexiste, où nous sommes soumis au droit des opérateurs, intervient la directive sur les services.
Jean-Paul BRIGAND
Le premier chapitre de la directive explique qu'elle s'applique à tous les services, y compris aux services d'intérêt général. Les exceptions concernent les secteurs où il existe des directives sectorielles. Je ne comprends pas pourquoi le logement ne revendique pas une directive sectorielle : il ne s'agit pas d'un service mais d'un équipement. La Commission audiovisuelle a demandé une directive sectorielle : nous pourrions nous engager derrière elle.
Le chapitre 2 signifie que tout prestataire peut s'installer en Europe. L'agrément devient autorisation dans le vocabulaire européen : elle est simplifiée au maximum grâce à un guichet unique obligatoire, qui peut être atteint sur Internet. Il faut par ailleurs démontrer que l'agrément est nécessaire. L'agrément conditionnel est interdit. Or il est impossible d'avoir un agrément HLM sans cotiser à la CGLLS. Cette condition est interdite. Les délais sont obligatoires. L'agrément HLM ne pourra plus favoriser un groupe ni être conditionné par la détention du capital. La compétence territoriale disparaît puisqu'un agrément est national. Le marché est ouvert à tous les prestataires de l'Union. L'article 21 pose le principe de non-discrimination. Le pays d'origine est chargé du contrôle du prestataire, y compris lorsqu'il fournit ses services dans un autre Etat membre. Ce PPO va simplifier des problèmes existants. Il pose toutefois des difficultés à l'autorité de contrôle de la Miilos hors de France.
La notion de conventionnement d'organismes sociaux non français devra être travaillée.
Le chapitre 4 traite de la qualité du service. L'obligation d'assurance responsabilité professionnelle entraîne la disparition du monopole de la CGLLS. En dehors des professions réglementées, les prestataires ne peuvent pas être obligés à exercer exclusivement une activité précise. Il y aura obligatoirement une redéfinition du périmètre réglementaire.
Les chapitres 5 et 6 portent sur le contrôle et la convergence. Comme les Etats seront obligés de mettre en place des coopérations entre Etats, les règles de contrôle sont remises en cause. L'organisation sera bouleversée par cette directive dès 2006.
Les attaques actuelles portent essentiellement sur le PPO et peu sur l'autorisation. Il est possible que j'aie ignoré certains problèmes sous-jacents au texte.
Marie-Noëlle LIENEMANN
La directive Bolkestein est en discussion car le gouvernement a fait pression pour qu'elle soit retirée. En réalité, la Commission ne l'a pas retirée : elle reste entre les mains du Parlement, qui est en situation d'exprimer des solutions. Le premier round se joue actuellement au Parlement : Evelyne Gebhardt a fait un premier rapport d'orientation. Les documents sont en discussion. Un document officiel sera rendu et le vote aura lieu en octobre pour la première lecture.
Il s'agit de sortir le PPO en distinguant le business to business, c'est-à-dire la sous-traitance, qui conserve le PPO et ce qui touche le consommateur, cas où le pays de destination ou la reconnaissance mutuelle règnent.
La nouvelle position parait plus féconde dans la volonté d'exclure les services d'intérêt général de la directive. Comme il n'en existait toujours pas de définition, Evelyne Gebhardt en propose une qui semble peu opérationnelle.
Le Parti conservateur, majoritaire au Parlement, s'offusque qu'un recul soit demandé à la fois sur le PPO et sur les services publics. La base proposée n'est donc pas appréciée par la majorité.
Le silence reste assourdissant sur les sujets qui nous concernent. Notre bataille consiste à ce que le logement social soit exempté de cette directive. La situation change au jour le jour mais risque d'avoir de graves conséquences à long terme.
Jean-Paul BRIGAND
Le rapport Gaymard est loin des usages juridiques traditionnels. Un service d'intérêt général répond aux critères suivants : sécurité de l'approvisionnement, accès généralisé, fourniture globale, continuité, sécurité juridique, caractère abordable, durabilité et cohésion. Il semble que l'opinion actuelle ne tend pas à garder une définition aussi large.
Laurent GHEKIERE
Il y a un débat entre le Conseil et la Commission qui travaillent sur un texte différent de celui proposé au Parlement. Le régime d'autorisation pose par ailleurs des problèmes pour l'agrément HLM car certaines exigences sont interdites. Par exemple, il est impossible d'obliger un prestataire à souscrire à une garantie quand il y souscrit déjà dans son pays d'origine. Il faudra notifier à la Commission nos demandes. Le PPO dans le secteur de la construction va nous obliger à gérer des droits différents. Les contentieux seront ingérables. Nous gardons pour ligne de conduite dans notre lobbying l'exclusion de tous les services d'intérêt général. L'autorité publique doit pouvoir imposer au prestataire des exigences autres que celles du pays d'origine. La proposition sur les services d'intérêt général a été refusée mais au sein de l'alliance du PPE, des failles sont sensibles : une vraie campagne d'information peut réussir.
De la salle
Je ne sais pas si la notion d'investissement est défendable, étant donné le précédent que constituent les prisons privées ou les gendarmeries privées.
Jean-Paul BRIGAND
Le transport est comme le logement, éclaté.
Laurent GHEKIERE
Ce n'est pas l'investissement qui est visé mais le service qu'il procure. Un logement est un bien mais, une fois occupé, il devient un service. En tant que fournisseur de logements, vous êtes prestataires de services.
Marie-Noëlle LIENEMANN
Nous avons toujours essayé d'éviter de séparer les fonctions de construction et de gestion. Nous vous tiendrons informés de l'évolution de la situation. Nous essayons de décoder les législations pour les rendre visibles. L'action que Laurent Ghekière mène à Bruxelles est excellente. Il faut faire un travail d'alerte sociale pour que les préoccupations sortent de notre secteur limité.
Jean-Pierre TROCHE
Nous nous situons dans un contexte de prise de conscience des enjeux européens.
De la salle
A titre informatif, j'ai calculé que nous sommes passés de 860 à moins de 500 postes dans les Côtes-d'Armor. Il faut penser à l'avenir de nos enfants, largement compromis par l'évolution de France Telecom et plus largement des services publics.
Il y a eu un débat en 1992 et certains ont pris position. Charles Josselin est intervenu dans un débat en affirmant clairement que le logement ne faisait pas partie de la réflexion européenne. Nous nous apercevons aujourd'hui que tous les services publics sont logés à la même enseigne. La France avait un système social qui lui était propre. Le système européen ne lui convient pas. A quoi sert un conseiller général ou un sénateur si tout est décidé ailleurs ?
Jean-Pierre TROCHE
Nous nous demandons si cette évolution ne s'accompagne pas d'une montée en puissance des pouvoirs locaux. Par ailleurs, il faut arrêter de raisonner en termes de menace. Considérons les opportunités que représente l'Europe.
Laurent GHEKIERE
Nous nous enfermons souvent dans une démarche défensive, qui consiste à vouloir exclure la France des textes. Je pense qu'il faut bâtir un cadre positif pour sortir de l'exception. A long terme, un encadrement communautaire doit créer un droit positif favorable aux services d'intérêt général et peut-être, dans son prolongement, une directive-cadre sur le logement social. Aujourd'hui, l'électricité, les communications, le gaz et les transports urbains ont des dispositifs d'application du droit communautaire bien plus souples que le logement social. C'est un pari politique : étant donné les équilibres politiques, je ne présenterais pas ce dossier au Parlement aujourd'hui.
Les coopératives en la matière ne changent rien aux règles d'application des traités. L'Union européenne a reconnu leur rôle comme instruments spécifiques dans le cadre d'une communication particulière. C'est un acte positif de reconnaissance d'une typologie d'opérateur alors que les traités privilégient le principe de la neutralité de l'opérateur. La légitimité politique de développement de volets participatifs ne constitue pas un rempart contre les règles de concurrence du marché intérieur.
Marie-Noëlle LIENEMANN
Nous étions soucieux de vous faire part de la situation actuelle et de vous alerter sur l'enjeu que constitue la question européenne et sur la vigilance qui s'impose. Je remercie les participants et le public, pour sa participation active. Nous nous sommes enrichis mutuellement de diverses informations. Je félicite nos nouveaux élus. Nous souhaitons que les efforts et les avancées que la fédération a produits puissent se poursuivre grâce à vous. Merci à l'équipe fédérale qui a préparé cette assemblée générale.
